Carnets de (ma) campagne 8

Publié le par ELmaTador

Quand il n'y aura plus d'eau pour le pastis...

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Cinq étés que je passe dans le sud de la France. Cinq années de sécheresse. Et autant d'années d'arrêtés préfectoraux ou municipaux limitant l'usage de l'eau. Et pourtant, pourtant il se construit toujours plus de piscines individuelles, dans cette région où le problème est encore plus prégnant qu'ailleurs. Les maisons à peine construites ont déjà leur bassin trônant au milieu du jardin, dont elles occupent parfois les trois-quarts de la superficie quand les heureux propriétaires endettés ont préféré s'offrir une piscine plutôt qu'un peu de terrain en plus. J'ai même vu un terrain où la maison n'a jamais été construite, mais la piscine oui : le terrain est aujourd'hui abandonné et la piscine sert de mare,  résonnant à la nuit tombée du doux chant des grenouilles.
De plus en plus de gens, également, creusent des puits profonds allant jusqu'aux nappes phréatiques, où ils se servent allègrement en omettant de se souvenir que ces nappes ne leur appartiennent pas en propre. Sans parler des agriculteurs qui cultivent du maïs et autres plantes généreusement arrosées en pleine journée estivale, dans des conditions où plus de 70 % de l'eau s'évaporent aussitôt sortie des tuyaux.
Ici, plus qu'ailleurs il me semble, l'individualisme devient la règle. C'est valable pour tout ce qui touche à l'environnement. La remarque qui revient le plus souvent : "C'est à l'Etat d'agir !" Il paraît que les Français ont un pouvoir d'achat en baisse : je me demande bien comment ils arrivent à se payer ces énormes 4x4 qui sont toujours plus nombreux à ronfler sur les routes, où ils tiennent lieu de monospaces. Pour la plupart, ils ne verront jamais la couleur d'un chemin et le système tout-terrain ne sera guère usé ;en revanche la consommation et la pollution seront bien celles d'un 4x4.
Pas question non plus d'y réfléchir à deux fois avant de s'acheter un climatiseur : en France, on fait l'impasse sur des investissements coûteux en isolation des maisons, au prix de factures de chauffage ou de climatisation toujours plus élevées. Et qu'importe que ces climatiseurs et ces chaudières rejettent de la chaleur dans un univers qui se réchauffe déjà…
Vu les taxes payées, nombreux aussi sont ceux qui ne s'échinent guère à trier leurs déchets. Mais ils seront les premiers à refuser les centres de traitement ou d'enfouissement ou les incinérateurs près de chez eux, prétextant la beauté de paysages qu'ils contribuent à détériorer. Le fameux syndrome NIMBY (Not In My Backyard = c'est utile mais j'en veux pas chez moi) a de beaux jours devant lui.
Et pas question, donc, de se priver de piscine alors qu'il fait si chaud ces étés-ci. Alors qu'il serait moins coûteux financièrement et écologiquement de bâtir des piscines de quartier. Individualisme, quand tu nous tiens...
Sacré donneur de leçons que je fais ! Sur tous ces sujets, je ne prétends pas être un saint. Cependant j'essaie au quotidien d'adopter les gestes les moins nocifs pour mon environnement immédiat, même si leur impact n'est ni immédiat ni visible. Et j'essaie de réfléchir aux conséquences de mes actes, de mes déplacements, de mes choix de consommateur, en imaginant ce que serait une Terre où tout le monde aurait un mode de vie occidental. Ce qui revient à imaginer une Terre où plus personne ne pourrait vivre, en fait.

Publié dans cafeducommerce

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